L’acteur Fritz Wepper a incarné l’assistant de l’inspecteur Derrick, Harry Klein, tout au long des différentes saisons de la série conçue par Herbert Reinecker. Dans la plupart des épisodes, l’Inspecteur Derrick est de manière manifeste celui qui mène l’enquête, dont les soupçons ou les intuitions se trouvent la plupart du temps confirmées et son assistant semble n’être là que pour lui donner la repartie, voire simplement assentir ou par son tempérament plus circonspect mettre d’autant plus en évidence par contraste la brillante capacité de raisonnement de son supérieur. Cette réputation supposée de terne subalterne a même engendré une phrase imaginaire censée être récurrente dans la série, bien que jamais prononcée : "Harry, va chercher la voiture !"
"Voilà ce que je crois, Harry ! Alors, qu'en penses-tu ? Oui, tu sais que j'ai raison, bien sûr !"
En réalité, cette vision, caricaturée dans le dessin animé parodique Derrick die pflicht ruft, est légèrement exagérée. Il arrive que les rôles soient plus partagés, que l'adjoint titille un peu son supérieur, exprime une divergence voire même prenne l'initiative, comme lorsque dans Une affaire étrange, c’est l’adjoint qui décide de pousser le portillon et de pénétrer dans une propriété privée en y entraînant son supérieur réticent afin d'apercevoir de l'extérieur une soirée festive réunissant un couple et l’amant dans une relation très particulière qui va éclairer les policiers sur les circonstances du meurtre sur lequel ils enquêtent. Plus anecdotiquement, Derrick en est réduit à ramasser les quilles pendant que ses collègues jouent au bowling, ce qu'il juge fort irritant, dans l'épisode Le mystère.
L'adjoint entraîne son supérieur hésitant dans la propriété d'Une affaire étrange.
Excédé d'être aux ordres de ses collègues au premier rang desquels Harry Klein, Derrick regimbe à remettre en place les quilles et finira par les renverser délibérément avec le pied dans l'épisode Le mystère.
L’adjoint est même parfois au premier plan lorsqu’il infiltre un milieu fermé. Dans Pension de famille, il loue une chambre incognito afin de découvrir le coupable qui a tenté d’assassiner la jeune pensionnaire (Helga Anders) avec des chocolats empoisonnés et on nous laisse entendre qu’il s’implique tant dans l’enquête qu’à l’instar des autres locataires masculins, il va jusqu’à s’adonner à son tour à un rapport sexuel avec la jeune fille fort peu farouche qui suscite la jalousie criminelle des deux femmes, lesquelles se démasqueront en refusant de boire le cognac censé provenir des dits chocolats. De même, dans Un petit coin tranquille, c’est principalement Harry Klein qui enquête dans la pension de famille dont la directrice a été victime d’un thé empoisonné à l’acide prussique, tandis que Derrick resté à son bureau de Munich centralise les informations, réfléchissant sur le profil des suspects. Plus étonnamment, lorsque dans le dénouement, l’inspecteur principal accule le meurtrier menaçant, le fils de la responsable appelée à succéder à la défunte dont il voulait précipiter l’héritage, et que celui-là finit par se suicider avec son revolver, son adjoint lui reproche très vertement son attitude en l’accusant d’être « devenu fou », l’estimant responsable de sa mort pour ne pas lui avoir laissé d’échappatoire, dans une brutale inversion des rapports hiérarchiques, une mise en cause à laquelle le supérieur ne répondra pas.
Il est vrai qu'Harry Klein est encore moins un foudre de guerre que son supérieur, plus aguerri et sans doute plus désabusé. Dans l'épisode Alerte, le second de Derrick est bouleversé d'apprendre que le malfaiteur qui a succombé à son tir n'est pas celui qui a abattu un employé lors du cambriolage commis avec ses complices. Bien qu'il n'a fait que se défendre lors de la tentative d'arrestation, il ne parvient pas à se consoler d'avoir ôté la vie à un homme qui n'était pas lui-même un meurtrier. Les évènements prennent un tour plus encore éprouvant lorsqu'il s'avère que la jeune femme qui a soigné ses blessures, Doris (Jutta Spiedel), n'est autre que la sœur du criminel qu'il avait mortellement atteint et chez laquelle celui-là avait cherché du secours - le titre originel, Die Schwester ("la sœur") est plus explicite quant la révélation sur laquelle repose l'histoire. La culpabilité que ressent Harry est encore accrue par ses liens naissants avec la jeune fille et sa fillette. L'affection entre le policier et Doris semble mutuelle bien que les sentiments de cette dernière soient nécessairement mélangés, mais cette relation potentielle semble par nature impossible, comme l'illustre l'épilogue dans lequel la jeune femme renonce à décrocher le téléphone.
Il arrive aussi que l'adjoint supplée son supérieur empêché. Dans Attentat contre Derrick, l'inspecteur principal, que des criminels avaient déjà tenté de compromettre en commettant un accident mortel avec sa voiture dans Un piège pour Derrick, connait sa première tentative d'assassinat, à la suite de laquelle il est plongé quelque temps dans le coma et il demeure alité durant tout l'épisode tandis qu'Harry Klein enquête sur l'auteur du crime qui a promis à sa maitresse de punir le policier ayant fait arrêter son mari. Dans l'épisode suivant, Le tueur de la nuit, Derrick se plie de mauvaise grâce aux injonctions médicales de respecter une période de convalescence, mais s'ennuie dans le sanatorium avant d'accepter de laisser à Harry "son" enquête sur un tueur de femmes - lequel sera finalement trahi par le massacre de sa propre chatte révélateur de sa brutalité.
Né le 17 août 1941, Fritz Wepper n’a guère connu son père, Friedrich Karl Wepper, un juriste, qui a perdu la vie au cours de l’hiver 1945 alors qu’on l’avait envoyé se battre en Pologne au sein de la 25 ème unité blindée de l’armée régulière. Dès l’âge de 11 ans, il participe avec son petit frère Elmar à une adaptation de Peter Pan, puis obtient en 1956 un rôle assez important dans une adaptation d’une fable des frères Grimm, Petite-table-soit-mise aussi connue sous le titre de Gourdin-sort-du-sac, The Wishing Table (Tischlein, deck dich). À l’âge de 18 ans, il est à l’affiche d’un film pacifiste inspiré d’une histoire vraie, Le Pont (Das Brücke) de Bernard Wicki qui reçoit le Golden Globe Award décerné au meilleur film en langue étrangère.
Le jeune Fritz Wepper, à gauche, dans un conte de Grimm.
Fritz Wepper dans Das Brücke, incarnant un de ces jeunes Allemands embrigadés par le régime belliciste du III ème Reich et promis à un destin tragique forgé dans la guerre, comme celui qu'a dû expérimenter son collègue Horst Tappert dans sa jeunesse durant la période.
Wepper devient une figure populaire auprès du public allemand à partir des années 1960 et apparaîtra dans les films Trois chambres à Manhattan de Marcel Carné, Cabaret de Bob Fosse et Le dernier combat de Luc Besson, film post-apocalyptique en noir et blanc dans lequel l’humanité est devenue aphone, qui obtint le prix spécial du jury et le prix du public du Festival d’Avoriaz en 1983.
C’est cependant la télévision qui va lui apporter une notoriété internationale. Après avoir interprété l’Inspecteur Harry Klein de 1969 à 1974 dans Der Kommissar, la production précédente d’Helmut Ringelman déjà basée sur des scénarios d’Herbert Reinecker, son personnage est affecté comme adjoint dans la nouvelle série policière Inspecteur Derrick auprès du détective éponyme incarné par Horst Tappert, avec lequel il avait déjà en 1969 été à l’affiche dans L’homme à l’œil de verre (Der Mann mit dem Glasauge) d’Alfred Vohrer. Il est dans la série d’origine remplacé par son frère Erwin, qui est interprété par son véritable frère Elmar durant les deux dernières années du programme. Les deux frères auront l’occasion d’être réunis à l’écran entre 1994 et 2000 en incarnant deux justiciers dans la série appelée explicitement Zwei Brüder (pour les non-germanophones, "deux frères"). Depuis l’an 2000, Fritz Wepper incarne un maire dans la série Um Himmel Willens.

Sa fille Sophie Wepper est devenue également actrice. Elle avait incarné dans la série Derrick une petite fille dont le grand-père maffieux voulait à tout prix récupérer la garde dans l’épisode Renata. L’acteur qui l’a conçue avec son épouse, décédée en 2019, Angela von Morgen, ex-princesse de Hohenzollern, a eu une seconde fille née d’une brève liaison avec l’actrice allemande Susan Kellerman. Dans les quinze téléfilms de la série Mord in bester Gessellschaft ("Meurtre en bonne société") tournés entre 2007 et 2017, Sophie Wepper a joué la fille du personnage interprété par son père, le psychiatre Wendelin Winter.
Sophie Wepper rayonnante auprès de son célèbre père.La presse populaire révéla que l’interprète d’Harry Klein qui ne dédaignait pas la chirurgie esthétique recourait aussi à d’autres expédients artificiels puisqu’il aurait eu quelques ennuis judiciaires liés à sa consommation de drogue, même si son partenaire Horst Tappert assura qu’il était toujours irréprochable sur le plateau. Fritz Wepper était aussi bien connu pour sa véritable frénésie pour la chasse, l’amenant à voyager dans le monde entier pour tirer le gibier à plumes et à sabots, sangliers, cervidés et antilopes, et il était accueilli en connaisseur par ses pairs.
Si ce genre d’occupation ne fait pas l’unanimité, on peut en revanche lui reconnaître un courage personnel alors qu’après le décès de son épouse, il doit affronter à 80 ans de graves soucis de santé. Après avoir survécu à un cancer de la peau et à deux lourdes opérations du cœur, il dut subir récemment l’ablation d’une tumeur à l’estomac. Cela n’a pas interrompu ses tournages pour la télévision, manifestant que celui qui débuta sa carrière précocement est toujours animé par la passion du métier d’acteur et que sans doute, il s’efforcera de l’exercer tant qu’il lui sera possible.